Qu’entend-on précisément par médias sociaux ?
On a vite fait de confondre les expressions « médias sociaux » et « réseaux sociaux » mais le premier englobe bien plus de sources et d’outils que le second. Par « médias sociaux », on entend généralement l’ensemble des sites et plateformes qui proposent des fonctionnalités « sociales » à leurs utilisateurs. Le terme remplacerait en quelque sorte celui de Web 2.0 qui tend à être de moins en moins utilisé.
Cela inclut :
- Les réseaux sociaux généralistes : Facebook, Google+, etc...
- Les outils de microblogging : Twitter
- Les réseaux sociaux professionnels : LinkedIn, Viadeo, etc...
- Les blogs
- Les wikis
- Les forums
- Les outils de curation : scoop-it, Paper.li
- Les outils de bookmarking : Delicious, Diigo
- Les outils de partage de vidéos : YouTube, DailyMotion, Vimeo
- Les outils de partage de photos : Flickr, Instagram, Pinterest
- Les sites et plateformes d’avis de consommateurs.
Quand on parle de veille et de surveillance de ces médias, c’est l’expression anglaise « Social Media Monitoring » qui est le plus souvent utilisée.
Quel intérêt pour les professionnels de l’info ?
Comme nous le mentionnions en introduction, la veille sur ces sources a d’abord été l’affaire de personnes intéressées par l’e-réputation d’une marque, d’un produit ou même d’une entreprise. Mais aujourd’hui, la surveillance des médias sociaux a également un intérêt pour des veilles concurrentielles, sectorielles, marché, commerciales et même, plus surprenant, scientifiques et techniques.
Tous les médias sociaux ne seront évidemment pas utiles pour tous les types de sujet (surveiller Instagram pour une veille scientifique très pointue dans le domaine de la métallurgie a en effet peu de chance de ramener le moindre résultat pertinent !) mais il convient, pour chaque type de veille, de bien réfléchir en amont aux sources « sociales » qui pourraient être intégrées au sourcing et apporteraient une valeur ajoutée aux sources plus traditionnelles.
Voici donc une liste des médias sociaux les plus utilisés et leur utilité potentielle dans le cadre d’une veille ou recherche d’informations :
- Facebook : surveillance des avis de consommateurs, surveillance de ce qui se dit sur une marque, un produit ou une entreprise, surveillance de groupes ou pages spécialisées sur des sujets précis, etc…
- LinkedIn : groupes de discussions sur un sujet, individu ou organisme qui partage les résultats de sa veille, surveillance et recherche de certains profils pour avoir des détails sur une entreprise (capacités de production, taille de l’équipe, données financières, etc...), identification d’experts…
- Viadeo : même intérêt que LinkedIn mais plus francophone
- Twitter : individus/experts qui font leur veille et la partagent sur Twitter, informations supplémentaires ou publiées en avance par rapport à ce qu’on peut trouver sur les sites Web/blogs qui ont aussi un compte, avis de consommateurs, reprise d’une information, identification de nouvelles sources, etc...
- You Tube : détection d’avis de consommateurs, de tests en ligne, de parodie d’une marque, de présentation d’une innovation produit, surveillance de la communication d’un concurrent, etc...
- Pinterest et Instagram : Instagram est plus utilisé pour partager ses propres photos tandis que Pinterest est plus un outil de curation d’images – surveillance d’une marque, d’un produit ou d’une entreprise, détection de nouveaux produits et stratégies innovantes, etc...
- Google+ (en perte de vitesse semble- t-il) : Individus/experts qui font leur veille et la partagent, avis de consommateurs
- Scoop-it, paper.li et les outils de bookmarking : individus/experts qui font leur veille sur un sujet et la partagent
- Les blogs et forums : experts qui publient un blog ou parlent sur les forums, surveillance d’une marque, d’un produit ou d’une entreprise, blogs d’entreprises qui contiennent des informations complémentaires à ce qu’on trouve sur le site, etc....
Ces exemples permettent de montrer la diversité des usages possibles dans le cadre d’une veille mais ne prétendent en aucun cas être exhaustifs.
Les 3 tests que nous avons effectués
L’évaluation des outils de recherche et de veille gratuits ainsi que des plateformes payantes s’est fondée sur la réalisation de trois tests distincts reflétant différentes situations auxquelles peuvent être confrontés les professionnels de l’information.
Test 1 : simple et sans ambiguïté
Pour le premier test, nous avons choisi de réaliser une veille sur une marque simple, sans ambiguïté et générant a priori peu d’informations. Nous avons choisi pour cela les « Coussins Lyonnais » (aussi appelés « coussins de Lyon »), une confiserie lyonnaise (un carré de couleur verte à base de chocolat et de pâte d’amande) créée dans les années 60 par le chocolatier Voisin et toujours commercialisée par ce dernier. Nous avons choisi de nous limiter au périmètre France uniquement et de nous intéresser à la réputation de la marque, l’usage de la marque déposée et à l’utilisation d’images éventuellement détournées.
Test 2 : Veille concurrentielle plus complexe aussi bien termes de stratégie que de périmètre
Pour le deuxième test, nous avons choisi de réaliser une veille concurrentielle sur un acteur de l’électroménager, en l’occurrence Whirlpool ainsi qu’une de ses marques locale en Europe (Laden pour la France). On ne s’intéresse ici qu’aux informations dites « corporate », c’est à dire aux lancements de produits, stratégie de l’entreprise, fermeture de sites, ouverture d’usines, licenciements, données financières, etc.... On exclut tout ce qui concerne les avis de consommateurs.
Concernant le périmètre géographique, nous avons choisi de nous limiter à l’Europe uniquement avec un focus particulier sur les pays où il dispose d’usines soit la France, l’Italie, la Slovaquie et la Pologne. Pour les langues, seules les informations en français, anglais ou italien nous intéressent.
Test 3 : recherche ponctuelle : packaging interactif / Interactive packaging
Pour le test 3, nous avons voulu voir ce que les médias sociaux et les outils spécialisés dans la surveillance de ces sources pouvaient apporter non plus dans le cadre d’une veille mais d’une recherche ponctuelle. Pour cela, nous nous sommes placés dans la position de quelqu’un devant réaliser un dossier de synthèse sur le packaging interactif/ intelligent, c’est à dire l’emballage qui interagit avec le consommateur ou avec d’autres produits en particulier son contenu. Le but étant d’identifier des exemples précis dans différents domaines (alimentaire, cosmétiques, boissons, etc...).
Si, pour des raisons d’espace nous n’avons pu inclure les résultats de ces tests de façon détaillée, ils sous-tendent l’intégralité de notre évaluation et notre appréciation finale.
Peut-on réellement utiliser des outils gratuits pour la veille sur les médias sociaux ?
Quand on réalise une veille, et encore plus quand on utilise des outils gratuits ou très peu chers, il faut se poser la question des sources à mettre sous surveillance. Vouloir TOUT surveiller n’a généralement aucun sens et ne conduit qu’à être noyé sous l’information. Pour les trois tests que nous avons effectués, nous avons donc déterminé quelles sources/types de sources pourraient avoir un intérêt.
Pour le test n°1, la veille d’e-réputation sur la marque « Coussins de Lyon » / « Coussins Lyonnais », nous avons déterminé qu’il serait judicieux de nous cantonner aux sources suivantes : Twitter, Facebook, You Tube, Pinterest, Instagram ainsi que les blogs et forums. Les réseaux sociaux professionnels ainsi que les outils de curation et de bookmarking n’étant pas vraiment en mesure de répondre à cette question.
Pour l’exemple n°2, la veille concurrentielle sur Whirlpool, nous avons en revanche sélectionné Twitter, LinkedIn, Viadeo, Scoop-it et Paper.li, Google+ ainsi qu’une sélection de blogs et forums (à identifier lors de la phase de sourcing). Dans ce cas, les outils de partage de vidéos ou d’images ou les réseaux sociaux fortement orientés vers l’aspect privé n’ont qu’un intérêt très limité.
Pour l’exemple n°3, la recherche ponctuelle sur le packaging interactif, les principaux médias sociaux dans leur ensemble peuvent avoir a priori un intérêt : les réseaux sociaux généralistes et outils de microblogging peuvent relater le lancement d’un nouveau packaging interactif ; les réseaux sociaux professionnels peuvent proposer des groupes de discussions sur cette thématique ; certains individus peuvent partager leurs veilles sur cette thématique ou une thématique approchante sur les outils de curation ; des experts peuvent publier des articles de fond sur le sujet sur des blogs ou intervenir sur des forums spécialisés et les entreprises ou individus/experts peuvent poster des images et vidéos de ces innovations sur des outils comme YouTube ou Pinterest.
Quels outils ?
La grande difficulté avec les outils gratuits, c’est qu’il n’existe pas un seul outil capable de surveiller l’intégralité des sources mentionnées précédemment. Il va donc falloir multiplier les outils. D’autre part, ces outils disposent généralement de fonctionnalités de recherche et de surveillance basiques et sont même parfois limités dans le nombre de résultats qu’il est possible de visualiser ou le nombre d’alertes que l’on peut mettre en place.
Le volume d’informations récoltées par l’ensemble de ces outils risque donc d’être important. Enfin, il existe toujours un risque pour que les outils en question disparaissent du jour au lendemain (exemple de Google Reader ou encore de Yahoo Pipes récemment).
L’une des premières actions que l’on peut réaliser lorsque l’on n’a pas de budget, c’est d’analyser chacune des sources/chacun des médias sociaux identifiés pour voir s’il est possible de surveiller des comptes ou des pages en particulier (via des flux RSS ou des systèmes d’alertes) ou bien des résultats de recherche sur leurs moteurs internes.
Malheureusement, à part dans le cas des blogs et des forums (et encore, ce n’est pas systématique), il est tout simplement impossible de récupérer directement sur le site le flux RSS d’un compte, d’un profil ou des résultats d’une recherche ou même de s’abonner à la moindre alerte mail.
Les différents médias sociaux font généralement tout leur possible pour restreindre l’accès d’outils ou services extérieurs à leur plateforme pour que leurs utilisateurs se connectent un maximum sur leur propre plateforme et utilisent leurs outils-maison.Sur la plupart des outils (Twitter, Facebook, LinkedIn, Viadeo, Google+, Scoop-it, You Tube, Instagram ou Pinterest notamment), il est nécessaire de disposer soi-même d’un compte pour suivre une personne/un profil / une page entreprise / un groupe / etc.... Par ailleurs, les nouveautés des comptes suivis n’apparaissent qu’au sein de la plateforme. Il faut ainsi se connecter à chaque média séparément pour visualiser les nouveautés…
Il n’existe généralement aucun moyen direct pour surveiller les résultats d’une recherche menée dans les moteurs internes des différents médias (à l’exception de Twitter qui propose une fonctionnalité de recherche sauvegardée mais il ne s’agit pas là d’une fonctionnalité de veille). Certains moteurs proposent d’ailleurs des fonctionnalités rudimentaires avec l’existence d’un unique opérateur AND implicite : c’est le cas de Facebook, Scoop-it, Instagram (la recherche ne peut porter que sur les hashtags) et Pinterest.
D’autres proposent des fonctionnalités de recherche un peu plus poussées : Twitter particulièrement, qui, en plus des opérateurs booléens classiques, offre la possibilité de rechercher des hashtags, de limiter aux tweets envoyés par une personne/à une personne ou mentionnant cette personne ou de conserver uniquement les messages contenant des liens. Google+ entre également dans cette catégorie, qui propose les opérateurs booléens classiques, la recherche d’expression exacte et un opérateur de proximité (terme1*terme2
) où les 2 termes ne peuvent être séparés que par 1 seul mot. You Tube permet quant à lui de limiter par type de vidéo, durée, date d’ajout, etc....
Enfin, certains réseaux sociaux comme LinkedIn et Viadeo imposent d’avoir un compte payant pour pouvoir profiter pleinement de toutes les fonctionnalités de recherche.
Au final l’un des seuls moyens de surveiller ces sources consiste à utiliser des outils de surveillance de pages gratuits ou peu chers (comme Diphur ou Website Watcher) mais cela ne fonctionne pas sur tous les types de pages et l’esthétique laisse plus qu’à désirer.
On pourra également se tourner vers des petits outils pour créer des flux RSS sur des pages qui n’en ont pas (à l’image de Yahoo Pipes qui va fermer ses portes sous peu – Voir Netsources n°116) mais cela ne fonctionne pas à tous les coups, loin de là, ou bien encore utiliser des petits outils spécialisés dans la surveillance d’un ou plusieurs média social. Dans cette dernière catégorie, on pourra citer plusieurs outils qui ont attiré notre attention :
- Queryfeed : https://queryfeed.net - Cet outil permet de récupérer au format RSS des résultats de recherche sur Twitter, Facebook et Google+ ainsi que des comptes Twitter. Le compte gratuit est très limité au niveau du nombre de résultats et le compte pro coûte 4.99 $ par mois et reste encore assez limité au niveau du nombre de résultats. De plus, l’outil ne semble pas fonctionner correctement pour Facebook.
- TwitRSS.me : https://twitrss.me - Cet outil permet de récupérer des flux RSS sur des comptes Twitter uniquement
- InoReader : http://www.inoreader.com - Ce lecteur de flux RSS fait beaucoup parler de lui en ce moment car il propose des fonctionnalités de recherche et de surveillance intéressantes. Il est notamment possible de suivre des comptes et des requêtes Twitter, Google+ et Vkontakte, des pages Facebook et de filtrer des flux RSS par mot- clé. La version gratuite est très limitée et il faut donc prendre un des abonnements pour bénéficier pleinement de ces fonctionnalités (à 2.99$ par mois ou 4.99$ par mois).
- Social Mention : un moteur de recherche spécialisé sur les médias sociaux qui permet de récupérer des flux RSS sur les résultats de recherche ou bien des alertes mails. Seul problème : sur les 3 tests effectués, aucun résultat ne provenait des grands médias sociaux comme Twitter, Facebook, You Tube ou encore Google+
- Meltwater Icerocket : http://www.icerocket.com - Le moteur gratuit permet de rechercher sur les blogs, Twitter et Facebook (ce dernier semble ne pas fonctionner) et de s’abonner aux résultats par flux RSS pour les blogs uniquement.
- Talkwalker Alert : http://www.talkwalker.com/fr/alerts - Cet outil permet de s’abonner à des alertes sur les actualités, les blogs et les forums uniquement. L’outil fonctionne bien mais le nombre d’alertes est limité et les réseaux sociaux, Twitter et les outils de partage d’images et de vidéos en sont exclus.
- Google Alertes Il existe bien évidemment Google Alertes qui permet de paramétrer des alertes (mail ou RSS) sur des recherches d’actualités, blogs, Web, vidéos, livres et discussions mais les résultats laissent de plus en plus à désirer.
- Topsy : http://topsy.com - Un moteur très intéressant qui permet d’effectuer des recherches sur Twitter (avec une antériorité remontant à 2006, date du premier tweet) et de s’abonner aux résultats par mail.
Au final, on se rend compte que se limiter à des outils gratuits relève vite du casse-tête. On pourra réussir à obtenir quelque chose d’à peu près cohérent sur le test N°1 car la stratégie est simple et le volume faible mais pour notre test n°2 (veille concurrentielle), c’est la garantie de passer ses jours et ses nuits à analyser des résultats en provenance de multiples outils qui peuvent disparaître du jour au lendemain.
Parallèlement à ces outils gratuits, il existe depuis plusieurs années des plateformes de veille spécifiquement dédiées à ces sources où bien des plateformes de veille multisources qui intègrent entre autres les médias sociaux. Nous en avons sélectionné une dizaine qui nous ont semblé répondre le mieux aux problématiques des professionnels de l’information pour notre programme de tests. Nous traiterons dans ce numéro Sindup et Synthesio et poursuivrons dans les prochains numéros avec les autres (dont Meltwater Buzz, Talkwalker, Radarly, Brandwatch, Sysomos, Mention, etc…).