Knowledge360 : pleins feux sur la veille concurrentielle

Fabrice Deprez
Netsources no
125
publié en
2016.11
762
Acheter ce no
Tags
outils de veille
Knowledge360 : pleins feux sur la veille concurrentielle Image 1
Knowledge360 : pleins feux sur la veille concurrentielle Image 1

Alors que se multiplient les solutions de veille « tout-en-un » certains acteurs préfèrent encore se focaliser sur un angle spécifique. C’est le cas de Knowledge360, une solution de veille dédiée à la surveillance de la concurrence.

Le choix n’est pas forcément surprenant : la veille concurrentielle est en effet, à tort ou à raison, souvent la pierre angulaire d’une stratégie de veille et son versant considéré comme le plus important par les décideurs.

Knowledge360 a lui l’ambition d’être une solution complète de surveillance des concurrents, en incluant bien sûr la veille mais aussi des solutions d’analyse.

Si Knowledge360 est relativement récent (sa première version est sortie en janvier 2016), la société américaine derrière cette solution, Cipher Systems, existe depuis 1996 et pratique l’intelligence économique au sens large, offrant des services de consulting en intelligence économique et analyse de marché.

Il est intéressant de constater que l’outil se veut très pragmatique et nous semble refléter les différences de sensibilité qui existent entre l’intelligence économique à la française, plus théorique, en quête d’exhaustivité des sources et plus centrée sur le process, et l’intelligence économique nord-américaine résolument pratique et orientée produit final avec des méthodes standardisées.

Focus sur les entreprises concurrentes

De par son positionnement sur la veille concurrentielle, l’interface de base présente ainsi les informations d’une société concurrente, dont la teneur peut être modifiée librement par l’utilisateur grâce à un système de widgets : affichage des résultats financiers de la société, dernières actualités ou offres d’emplois en rapport avec cette société, ou encore derniers changements de dirigeants.

Pour ce faire, Knowledge360 dispose d’une base de données d’entreprises qui inclue, d’après l’un des directeurs de Cipher Systems Beau Oliver « toutes les sociétés faisant plus de 100 millions de dollars de profit », grâce à un partenariat avec la base de données financière FactSet. Rappelons que Facset est un acteur important de l’information financière qui existe depuis 1978 et fournit en temps réel des données du marché, des nouvelles, des analyses des entreprises et industries et des simulations de portefeuille.

Knowledge360 nous a indiqué disposer de près de 500 000 sources.

En plus des informations sociétés issues de Factset, l’outil propose de nombreuses sources de presse. Knowledge360 a ainsi recours à plusieurs agrégateurs de presse ainsi que ses propres agrégateurs propriétaires.

Knowledge360 comporte également un volet médias sociaux permettant de suivre de près l’actualité des entreprises sur Twitter et Youtube. Le suivi des réseaux sociaux est néanmoins relativement limité par rapport à ce que proposent d’autres solutions : il n’est pas possible de réaliser des recherches complexes ou de recevoir d’importantes masses de données, mais simplement de suivre une poignée de comptes.

Enfin, Knowledge360 offre la possibilité de surveiller blogs et forums : cette fonction n’est pas activée par défaut (« car elle n’intéresserait pas la plupart des sociétés », selon le directeur du développement) mais peut l’être sur simple demande.

Parmi les fonctionnalités plus originales, on trouve la surveillance et la cartographie des offres d’emplois d’une société. Celle-ci est basée à la fois sur des sites d’offres d’emplois ainsi que sur les offres publiées sur les sites des sociétés elles-mêmes. Les offres d’emplois peuvent représenter un signal faible très pertinent (d’autant plus lorsqu’elles sont géolocalisées, comme c’est le cas ici) et la fonctionnalité est donc très intéressante.

Cette interface, avec une présentation des informations par société n’empêche pas pour autant de surveiller plus largement une industrie toute entière. De plus, il est également possible, grâce aux fonctionnalités que nous présenterons par la suite, de surveiller des entreprises de plus petites tailles et notamment des PME.

L’interface est divisée en plusieurs grandes sections : Dashboards, Knowledge, Analysis et Report

Les dashboards au cœur de la veille

C’est ici que sont rassemblés toutes les sources et les éléments collectés via la veille.

La section « Dashboard » est divisée en trois sections, « Home », « Company » et « Sandbox » pouvant elles-mêmes être divisées en une infinité de pages.

La section « Home » fait office de page d’accueil. « Company » permet d’avoir une vision rapide et complète des activités de chaque société qui nous intéresse. On peut, de plus, facilement personnaliser cette « vision » par le biais des widgets. Enfin, la section « Sandbox » permet de personnaliser ses tableaux de bord de manière totalement libre.

Cette division offre une grande flexibilité. Flexibilité dans la manière d’organiser sa veille, d’abord : il est ainsi possible de faire un dashboard « Actualités » et un autre « Résultats financiers », qui couvriront chacun une multitude de sociétés, ou alors de réaliser un dashboard par société, qui regroupera l’ensemble de la veille de cette société. Il est même possible de faire les deux, avec par exemple des tableaux de bord « généralistes » pour suivre un secteur, et des tableaux de bord centrés sur les concurrents les plus importants.

Figure 1.Exemple d’un tableau de bord centré sur la société « Total »

L’autre grande source de flexibilité offerte par ce fonctionnement se trouve dans la collaboration avec les équipes de l’entreprise : chaque dashboard peut en effet être partagé de manière individuelle afin de s’assurer que chacun dispose des informations qui lui sont nécessaires sans pour autant être noyé: les tableaux de bord du service veille peuvent ainsi rester invisible au reste des collaborateurs, qui auront par contre accès à des tableaux de bord qui leur seront spécifiquement dédiés.

Pour inclure une société à surveiller, il suffit ainsi de taper son nom dans la barre de recherche : une série d’informations (résultats financiers ou actualités) relatives à cette société apparaitront alors automatiquement (Figure 1). Knowledge360 prend de plus en compte les filiales de cette société.

Même si la création d’une surveillance est en partie automatique, il est ensuite possible de personnaliser les différents éléments. On peut par exemple personnaliser le widget « news » afin de surveiller des requêtes spécifiques.

Une autre fonctionnalité originale de Knowledge360 est l’atténuation de la frontière entre l’information obtenue en ligne et celle issue de l’entreprise elle-même. Les utilisateurs de la solution ont ainsi la possibilité d’uploader leurs propres fichiers, qu’il s’agisse de tableaux, de prises de note ou de rapport PDF. Tous les fichiers possédant du contenu écrit seront ensuite analysés par un logiciel sémantique et pourront ensuite être librement utilisés par le reste de l’équipe, accessibles dans la partie « Field Intelligence » de la section « Knowledge ».

Surtout, cette intégration ne se limite pas à une section isolée : ainsi, si un collaborateur a fait remonter un rapport sur la société, celle-ci apparaitra dans la page dédiée à cette entreprise, un moyen très simple mais particulièrement efficace de réunir information externe et interne.

Knowledge360 semble cependant moins à l’aise avec les entreprises non américaines, du moins lorsqu’elles ne sont pas des géants mondiaux : les poids lourds français Sanofi (pharmaceutique) ou Saint-Gobain (BTP) fonctionnent ainsi parfaitement.

Knowledge : une base de connaissance puissante

Si les tableaux de bord sont au cœur du système de veille de Knowledge360, l’interface propose également plusieurs autres sections : « Knowledge » , « Analysis » et « Report ».

La rubrique Knowledge s’apparente plus à une base de données, une base de connaissance que l’on interroge pour mobiliser les 500 000 sources intégrées dans la plateforme ainsi que les documents ajoutés par les utilisateurs. Les données financières et les fiches sociétés proviennent de FactSet ; pour le reste il s’agit principalement de presse et de sites d’offres d’emploi. 85 langues sont accessibles à la demande du client.

La fonctionnalité de recherche, assez basique au premier abord, est rendue particulièrement pertinente grâce à l’ajout des nuages de tags et d’un onglet de tendances. Ceux-ci, souvent assez « gadget » sur d’autres plateformes, s’avèrent ici très utiles pour naviguer efficacement parmi une masse de résultats.

La recherche en elle-même est très sobre (et certains seront peut-être un peu frustrés par le relatif manque d’options) : tous les opérateurs booléens classiques peuvent être utilisés, et la recherche peut être limitée à une période précise. Il est aussi possible de croiser la requête avec les noms de société présentes dans la base de données de Knowledge360. Les recherches, enfin, peuvent être sauvegardées et partagées.

Chaque recherche génère, en plus d’une liste d’articles correspondant à la requête, un nuage de tags qui permet, d’un coup d’œil, d’observer les termes les plus fréquemment employés. Mais cette fonctionnalité est bien plus puissante qu’il n’y parait, permettant notamment de cibler la recherche selon les besoins du moment.

Le nuage de tags est en effet largement interactif et peut être divisé selon 34 critères différents, qui peuvent tous à leur tour être « creusés » :

  • « Person » donnera les noms des personnes les plus souvent mentionnés dans les articles répondant aux critères de recherche ;
  • « Company » affichera les sociétés les plus souvent mentionnées ;
  • Et, bien sûr, « Country » affichera les pays les plus souvent mentionnés.

Si l’on prend l’onglet « Person », il suffit de cliquer sur l’un des noms affichés pour obtenir tous les articles mentionnant ce nom. De la même manière, choisir un pays permet de très simplement réaliser une recherche sous un angle géographique.

Cette manière de fonctionner s’avère particulièrement intéressante pour traiter des recherches larges, qui couvrent des secteurs entiers et renvoient ainsi une masse de résultats difficilement exploitables de prime abord. Le nuage de tags permet ainsi immédiatement de voir les thématiques les plus importantes du moment, et d’obtenir immédiatement les articles répondant à ces thématiques.

Situé juste à côté, l’onglet « Tendances » permet lui de voir d’un coup d’œil les pics de publications d’articles correspondant aux critères de recherches. Ces deux outils permettent de transformer la fonctionnalité de recherche en véritable détecteur de tendance.

La section « Documents » liste l’ensemble des documents publiés par les personnes se servant de la solution, en spécifiant pour chaque document la personne l’ayant publié, le type des documents ainsi que les entreprises citées dans ce dernier. Le document peut être prévisualisé directement dans Knowledge360, ou téléchargé.

« Field Intelligence » est similaire, en réunissant les rapports écrits par des membres de l’équipe : la différence néanmoins est que « Field Intelligence » est vu comme un moyen de faire remonter très simplement des informations, et donc pas seulement des documents, récupérés par les membres de l’entreprise : un employé ayant appris une information intéressante dans une réunion peut ainsi envoyer un mail à une adresse définie, ce qui ajoutera automatiquement le texte (ainsi que les images, s’il y en a) dans la section « Field intelligence ».

Pour l’analyse

La section « Analyses » permet de réaliser une série de graphiques et autres tableaux en utilisant une liste de « templates » divisée en quatre catégories : des tableaux de concurrents (permettant de comparer ces derniers), des graphiques généralistes, des graphiques centrés sur les données financières et enfin des analyses SWOT. L’ensemble des données disponibles sur Knowledge360, par exemple les données financières issues de la base de données FactSet, peuvent être utilisées pour réaliser les analyses, mais il est aussi possible d’insérer ses propres données (chiffres et textes).

La section « Report » est quant à elle beaucoup plus large et permet de réaliser des livrables de veille. Extrêmement personnalisable, il est possible d’y insérer l’ensemble des « widgets » présents sur la solution, depuis des articles d’actualité jusqu’à des données financières en passant par des informations relayées par des collaborateurs de l’entreprise, afin de créer le « template » d’un livrable. Le livrable peut ensuite être exporté au format PDF et diffusé : l’ensemble des liens resteront cliquables et, dans le cas des articles d’actualité, mèneront directement vers le site d’origine.

Conclusion : une solution encore jeune, mais déjà efficace

Si Knowledge360 se limite à un versant de la veille, la veille concurrentielle, la solution se veut autosuffisante dans ce domaine. Est-ce le cas ?

Lorsqu’il s’agit de surveiller des entreprises multinationales dans des secteurs bien établis, la réponse est sans conteste oui. L’importante masse de données pouvant être collectées, la facilité avec laquelle il est possible de trier ces données, les possibilités de travail en équipe, la flexibilité avec laquelle l’on peut surveiller secteurs autant qu’entreprises individuelles, tout cela concourt à permettre une efficace surveillance, mais aussi à diffuser cette surveillance de manière simple et intuitive.

Néanmoins, Knowledge360 se repose en partie sur une base de données d’entreprises qui donne ainsi la préférence à ces très grandes entreprises. Le versant « Company » de la société s’avère ainsi moins efficace pour la surveillance de secteurs très mouvants (comme les hautes technologies ou les start-ups) ou pour une veille s’intéressant à des entreprises de taille moyenne. Néanmoins, la personnalisation des widgets et des requêtes permet de contourner ces restrictions.

Du côté des critiques, on peut aussi mentionner l’interface un peu « old school » ainsi qu’une ergonomie encore perfectible. Enfin, le peu de possibilités de surveillance des réseaux sociaux est un problème pour une solution qui se veut « tout en un ».

Notons néanmoins que la solution reste jeune, et s’améliore continuellement : une mise à jour est actuellement mise en ligne toutes les deux semaines environ, et la majorité d’entre elles offre de nouvelles fonctionnalités.

Les rapports de mise à jour publiés par la société et librement accessibles par les clients donnent d’ailleurs l’impression d’une entreprise transparente et à l’écoute des feedbacks (plusieurs modifications ou ajouts de fonctionnalités cités dans les communiqués mentionnent le rôle joué par les retours utilisateurs), un point toujours important. Déjà efficace, Knowledge360 devrait donc s’améliorer sensiblement dans les mois à venir.

En terme de prix, plusieurs abonnements sont proposés, le moins cher débutant tout de même à 1199 $ US par mois ! L’intégration des données de Facset, une base de données réputée très cher n’y est probablement pas pour rien.

La plateforme est recommandée et certifiée par SCIP (Strategic and Competitive Intelligence Professionals), l’une des principales associations des professionnels de l’information et de l’intelligence économique aux Etats-Unis. On peut cependant se demander si c’est bien le rôle d’une association de mettre en avant ce produit plutôt qu’un autre et de proposer des réductions à ses membres pour toute souscription à la plateforme...